Un chantier rarissime est
en cours au sein de la basilique
cathédrale de Saint-Denis, tombeau des Rois de France : la réfection complète
du chœur. « Ce n'est que le 8e en 1 500 ans d'histoire », précise Jacques Moulin, architecteen chef des
monuments historiques, maître d'œuvre du chantier. Depuis quelques semaines, la partie centrale de l'édifice religieux est cernée de palissades en bois. Elle doit retrouver une splendeur digne de
cette merveille de l'art gothique, conçue par l'abbé Suger au XIIe siècle et devenue également cathédrale (c'est-à-dire le siège d'un évêque) il y a seulement 50 ans. La dernière modification du
chœur date de cette époque.« Il était temps de l'aménager pour les siècles à venir. Nous avons donc sollicité des artistes du monde entier, avec comme ligne conductrice l'harmonie de la pierre et
de la lumière, symbole de cette basilique », explique Monseigneur Pascal Delannoy, évêque de Saint-Denis.Pour le mobilier liturgique, autrement dit l'autel (table d'où le prêtre célèbre la
messe), l'ambon (le pupitre où sont lus les textes sacrés) et le dosseret (cloison derrière le siège de l'évêque), c'est l'artiste slovaque Vladimir Zbynovsky qui a été choisi. « Sa compréhension
du lieu nous a éblouis, explique Jacques Moulin. Il a compris l'importance de la lumière dans la basilique, une tradition qui remonte aux premiers vitraux, dès l'époque carolingienne, et plus
encore à l'époque de Suger, où les vitraux occupent des murs entiers : il y a plus de verre que de pierre ! La basilique fut longtemps appelée la lanterne. »Vue du futur chœur de la basilique
Saint-Denis. Une lumière naturelle illuminera la crypte, tombeau des Rois de France. (2BDM Architectes). Pour correspondre à l'identité du lieu sacré, Vladimir Zbynovsky a conçu un autel de
pierre, surmonté d'une plaque de verre de 20 cm d'épaisseur, le tout creusé en son centre d'une croix. La lumière naturelle traversera l'autel, pour venir éclairer la crypte, tombeau des Rois de
France, située juste en dessous. Ce trésor archéologique va lui aussi être réaménagé d'ici septembre (lire ci-dessous).Point d'orgue de cette rénovation, la création du nouvel autel de pierre et
de verre sera une véritable prouesse technique. Pour fabriquer la plaque de verre optique d'une pureté extrême, il faudra le concours de trois entreprises spécialisées, qui devront la couler à
même la pierre et la laisser refroidir extrêmement lentement, pendant deux ou trois mois, pour éviter qu'elle ne se casse.Les dalles dessinées par Viollet le
Duc sont nettoyées. Un trou en forme de croix au milieu permettra de laisser passer la lumière dans la crypte. (LP/J.-G.B) Le mastodonte d'1,2 t prendra place au centre du chœur, sur les dalles
colorées conçues au XIXe siècle par l'architecte Viollet-le-Duc, nettoyées pour l'occasion. Derrière, le petit mur qui faisait office de dosseret est en train d'être abattu, pour laisser place à
un demi-cercle en acier ou en aluminium, sur lequel sera gravé un texte sacré en grec. « Sa forme évoquera le manteau revêtu par les évêques », explique Vladimir Zbynovsky.Le nouveau chœur sera
dévoilé début septembre. Les temps d'être créés et financés, le mobilier liturgique sera, lui, installé courant 2016. Les 300 000 visiteurs annuels de la basilique pourront alors enfin profiter
des richesses d'un édifice refait à neuf, à l'intérieur comme à l'extérieur. Jean-Gabriel BontinckUn nouvel écrin pour les sarcophages des Rois de France « Il ne faut pas l'oublier, cette
basilique a un sous-sol. Nous allons le repeupler, avec tous les sarcophages qui devaient y être. Nous en avons rassemblé une soixantaine en un an et demi. Certains étaient devenus des pots de
fleurs… » Jacques Moulin plaisante à peine, lorsqu'il décrit l'état d'abandon de certaines sépultures. Pour l'architecte en chef de ce monument historique, il fallait « redonner sa signification
à la crypte ». C'est-à-dire réaménager le lieu où les tombes des Rois de France étaient installées pendant des centaines d'années.À l'endroit même où l'évêque martyr Denis, sa tête sous le bras,
a été enterré au IIIe siècle, le chœur actuel de la basilique avait été reconstruit. Le caveau historique avait ensuite été rouvert par Napoléon III, pour y installer les dépouilles de Bonaparte,
mais il n'a finalement jamais servi et fut vide pendant des années. Il a fallu plusieurs travaux d'excavation, au XIXe et XXe siècles, pour redonner à ce tombeau son aspect d'origine. Les
derniers aménagements sont en cours.« Il y aura les sarcophages carolingiens au premier plan, puis les Mérovingiens au second, et, au-dessus, les grands sarcophages royaux. En se remplissant,
cette crypte va reprendre l'aspect qu'elle n'aurait jamais dû perdre », poursuit Jacques Moulin. La réouverture au public est prévue en septembre.La rénovation de la façade presque achevéeAutre
chantier d'ampleur, celui de la façade du célèbre monument, lancé en 2012. Le public pourra admirer sa blancheur retrouvée en juillet, après trois ans de travaux minutieux. Les sculptures abîmées
ont été refaites, les pierres noircies ont été nettoyées et des couleurs ont fait leur retour, comme au temps de l'abbé Suger. La basilique a déjà retrouvé sa splendeur sur la travée nord de sa
façade, et en haut de la travée centrale. Il reste à démonter les échafaudages devant le portail central et la travée sud. « Nous aurions aimé le faire pour le festival de Saint-Denis, en juin,
mais il faudra attendre quelques jours de plus », indique Jacques Moulin, architecte des monuments historiques.Un appel lancé aux mécènesL'Église se met à la mode du « crowdfunding » : pour
financer la rénovation du chœur de la basilique, l'achat du nouvel autel et le réaménagement de la chapelle du Saint Sacrement (entre 400 000 et 450 000 € de budget), les fidèles ou simples
amoureux du patrimoine sont sollicités. Vous pouvez faire un don en contactant l'association « Les amis de la basilique cathédrale Saint-Denis » (www.amisdelabasilique.org). Présidée par l'ancien
préfet Jean-Pierre Duport (en poste à Bobigny de 1993 à 1997), cette association démarchera aussi des entreprises mécènes. « La basilique est un élément important de mise en valeur du
département. Cela peut intéresser des entreprises d'y participer », estime Jean-Pierre Duport. (source : Leparisien.fr)
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